Vampire : la Mascarade et surtout sa 5ème édition, je l’adore. C’est une de ces gammes qui ne se moque pas de vous quand elle annonce une nouvelle édition. Retravail des règles, of course, mais surtout évolution du background pour coller à son temps, tant au niveau des thématiques sociétales que de la cohérence de l’évolution des technologies. Fini le chichi : des antédiluviens éveillés en guerre avec tout le monde, un Sabbat terroriste dans son essence, une humanité dangereuse car surarmée. Et au milieu de tout ça, le joueur incarne un vampire paumé entre deux sociétés vampiriques antagonistes.
Passé le livre de base, même les compléments je les ai aimés (je vais parler ici de la VF). Un sur la Camarilla et un sur les Anarchs avec option pour les joueurs, approfondissement de ce que c’est qu’être vampire au XXIème siècle, nickel. Et quant au complément sur la chute de Londres (en VO) qui narre le début de la seconde inquisition et le péché d’orgueil des vampires, il y a du travail pour mener la campagne mais le fond marche bien.
Et voilà qu’Arkhane annonce le complément “Sabbat”. J’étais un peu inquiet. Dans le Livre de base, la secte du Sabbat avait pris un visage de parfait boogeyman insaisissable et dangereux. Et y a un truc que l’horreur m’a apprise, c’est qu’elle ne marche que tant qu’elle reste mystérieuse. Dès qu’on tente de m’expliquer pourquoi que le fantôme, il fonctionne au courant alternatif quantique, c’est plus vraiment de l’horreur, c’est juste un monstre. Vous voyez pourquoi j’étais méfiant ?
Résultat – parce que j’aime la contradiction – je m’étais promis de l’acheter à sa sortie pour me faire un avis. Et le bouquin a su me choper là où je ne l’attendais pas et me prouver que cette 5ème édition tient ses promesses. Le complément sur le Sabbat est même un exemple de ce que je recherche dans les livres de contexte !
Fiche technique
Un contexte sobre et moderne !
Clairement au bout de quelques pages, j’étais fan. Transformer l’esprit du Sabbat dans une secte décentralisée qui déshumanise sa chair à canon pour les envoyer crever, c’est totalement parfaitement horrible. C’est pas loin des éditions précédentes mais pour la première fois le terme “secte” pour le Sabbat a pris du sens pour moi.
Tout dans les méthodes du Sabbat (avec du surnaturel) se rapproche des sectes de notre monde. Je vais prendre trois gros exemples pour étayer cette affirmation.
Premièrement, les Voies (qui remplacent l’Humanité) ne sont pas tant des alternatives à l’humanité que des croyances déviantes qui vous obligent à renier qui vous étiez afin de vous couper de votre ancien vous. Alors c’est clair que de devenir vampire, ça change pas mal de chose mais la Camarilla autant que les Anarchs se basent sur l’humanité. Et même parmi les anciens, des restes d’humanité et ce qu’ils étaient apparaissent. Cette adaptation est super intéressante. Même le détail du nouveau nom pour marquer sa renaissance m’a rappelé le langage sectaire.
Ensuite, après vous avoir coupé de votre ancien monde, on va vous broyer l’individualité. La vaulderie (en gros un rituel qui brise le lien de sang et qui unit des gens entre eux) est ici un moyen de contrôle sur les masses où la personne n’existe plus qu’en tant que meute et ne pense plus à elle-même. Fini mon idéalisme romantique sur un lien entre potes.
Et enfin tout le vocabulaire sabbatique est liturgique. On parle de prêtre qui guide les meutes, d’évêques et d’archevêques. On n’appartient pas à un clan mais à une voie, on pratique des rites et surtout, surtout… On est en guerre contre la fin des temps, dans ce que l’on appelle un Jihad.
Rien de tout ça n’est nouveau dans la gamme mais cette mise en avant est pertinente et donne sens au Sabbat. Dorénavant c’est ce que dans notre monde réel, ils sont ce que nous appelons des terroristes. Et même si ça n’évoque rien de bon, c’est une thématique contemporaine.
Un contexte qui n’oublie pas
Un autre bon point dans cette réinvention c’est que le passé n’est pas effacé. J’ai évoqué les choses réinterprétées dans le paragraphe précédent mais le livre prend bien soin de faire la filiation avec le reste de la gamme.
On mentionne les voies déchues et les raisons de leur abandon avec ce contexte de jihad. On explique pourquoi la seconde faction vampirique a pu perdre autant de territoires. Le livre d’ailleurs ne parle pas de perte mais de nouvelle direction. Faisant comprendre ainsi que la secte n’était sans doute pas la réponse efficace contre les antédiluviens.
Un contexte didactique
Tout d’abord gros big up pour l’explication sur le mode de fonctionnement d’une pareille armée. Il y a dans ce livre une cohérence sur les actions du Sabbat vraiment bien fichue avec des portes si le Conteur désire s’écarter de la proposition initiale.
Ensuite et c’est vraiment agréable, quasi aucune information inutile. Je m’explique. Le livre n’est pas là pour permettre aux joueurs de jouer des sabbatiques mais bien de permettre au Conteur d’incarner le sabbat comme antagoniste de sa chronique. Du coup tout, des rituels jusqu’aux Voies en passant par les façons de procéder du Sabbat est orienté pratique.
A chaque affirmation, un encart qui explique ce que ça apporte au scénario, ce qu’on peut en faire comme scénario et plus globalement l’intérêt d’avoir mentionné ce point. Alors après coup, je réalise que c’est ce qu’on devrait chercher quand on met une information dans un jdr mais ça ne m’était jamais apparu aussi clairement qu’avec ce livre.
Clairement, lorsque Arkhane (qui me lira j’en suis sûr) traduira (Hein que c’est pour bientôt dites ? ) Chicago by Night, je rajouterai le Sabbat du bouquin parce que j’ai envie de faire honneur à ce livre.
En bref
Le Sabbat est un livre comme j’en voudrais plus dans ma bibliothèque. C’ est une histoire tout autant qu’une boîte à outils qui réinvente son matériel sans simplement le réciter à nouveau. Pour tout ça, je vous conseille de l’acheter si vous aimez Vampire et sa 5ème édition !