Introduction
Parfois lorsqu’on se promène sur le net, on tombe sur des mausolées d’illustres inconnus qui se sont échinés à construire une œuvre dantesque qui s’est effondrée avant d’avoir vu le jour… Et puis vous sur ces mêmes routes fangeuses, vous tombez sur un type avec son masque de corbeaux qui vous demande de circuler car ce qu’il garde est pire que tout. Ce qu’il garde c’est un concept besogneux et délirant qui, sous des approches de règles faciles, tente de vous prendre à la gorge et de vous plonger dans un esprit fécond : Macadabre !
Alors oui, je l’ai fait version littéraire sous cachet mais Macadabre est un jeu que je qualifierais plus qu’affectueusement de grotesque et outrancier. Il est laid du début de son propos jusqu’à sa conclusion et l’univers du jeu crie qu’on le triture encore plus pour qu’il ne reste qu’une vieille flaque de pus heureuse d’être là.
Voilà vous êtes prévenu ! Si d’ores et déjà vous plissez le nez, c’est que ce jeu n’est pas fait pour vous (ou que vous ne savez pas encore à quel point vous allez aimer ça). Mais avant d’aller plus loin, le pitch et le lien vers le jeu de rôles (Là faut imaginer une musique style Les Experts mais médiévale).
« En l’an 1366, en plein obscurantisme moyenâgeux, la province de Saint-Voile est ravagée par une étrange pestilence transformant sa population en créatures dégénérées, déviantes et bestiales.
Si la province, pauvre et bien trop éloignée de la capitale, n’intéresse pas la Couronne ; la fuite de la population face à une épidémie en pleine propagation, les rumeurs d’une nouvelle religion se développant dans la région, l’anathème de l’Église sur la cité fortifiée dirigée par la sulfureuse Comtesse et l’absence de communications avec cette dernière contraignent le roi à mandater un collège de médecins de peste.
Le but de cette brigade méprisée : éradiquer la source de cette malemort ou mourir en essayant. »
Exploration, survie, forte mortalité, forte rejouabilité : Macadabre est un jeu de rôle médiéval-fantastique, old school, sombre et horrifique où 1 à 12 Docteurs (joueurs adultes) explorent une province et affrontent des bestes en risquant leur âme et leur vie.
Préparation
Et bien c’est l’avantage de Macadabre, niveau préparation on est dans le simple. Le livre n’est pas volumineux et les règles sont simples. Le principal boulot est donc de parcourir l’ouvrage pour avoir une idée globale et d’aller imprimer vos cartes (outils en jeu et hors-jeu). Ensuite (dans mon cas), installer un micro et une caméra mais ça c’est parce que je voulais pouvoir le diffuser et finalement bien expliquer à vos joueurs ce qu’ils vont devoir affronter, question d’être transparent. C’est simple donc et comme un jeu de plateau, le principal de l’activité se trouve dans le jeu qui va arriver.
Préparation vis-à-vis de mes joueurs
J’ai donc réuni 6 joueurs autour d’une table. J’ai bien expliqué le contexte et nous avons convenu de quelques autres règles afin de rendre l’expérience la plus intéressante possible.
Parce que le thème pouvait aborder des sujets sensibles, j’ai convenu d’un safeword (Tartiflette parce que c’était à la fois décalé sans trop trancher avec l’univers… Bon ok ça tranche mais j’aime bien tartiflette) qui autorise le joueur à se retirer de la table temporairement si l’ambiance lui pesait trop.
Ensuite, j’ai voulu ajouter un inconfort physique. Interdiction d’être assis, interdiction de boire ou manger pendant une scène et pause toilette à ma convenance.
Et finalement, le jeu étant ce qu’il est, je ne suis pas MJ. Je deviens la Comtesse et je mets un masque de cochon pour incarner ce personnage. Protagoniste des joueurs mais aussi participant à part entière de leurs aventures.
Alors dis comme ça, on dirait un jeu vaguement SM mais l’objectif était concrètement de donner une ambiance unique au jeu et j’ai voulu au maximum suivre les consignes de l’auteur.
Déroulement
Après la mise en accord des attentes du jeu, de moi et de mes joueurs, c’est parti pour la création de personnages ! Petite note positive, c’est sans doute la création la moins prise de tête au monde. On lance un dé pour définir : un métier, une spécialisation, une aspiration et une réaction face à la peur et puis c’est tout. Ça donne une idée de son personnage et chacun y va de son commentaire sur qui fait quoi (Deux joueurs étudiants et un autre professeur et les voilà en train de faire un colloque).
Ensuite on jette une dernière fois les dés sur la carte pour savoir où commence l’exploration et c’est parti !
Je ne vais pas vous spoiler sur le jeu lui-même (C’est un de ses plus grands plaisirs après tout) mais je vais néanmoins vous donner une idée du déroulement. Vous pouvez (avec plus de spoil) visionner la vidéo aussi (disponible ici) ; comme vous préférez.
Donc une fois la case tirée, la Comtesse se réfère à la case et prend note de l’événement lié à celle-ci. Il (oui je suis un il et elle est un elle) commence alors à décrire la scène en y intégrant ce qu’il a lu et les joueurs prennent alors les décisions qui s’imposent. L’idéal est que la situation génère de l’inconfort, des choix cornéliens et surtout distille son horreur. Une fois la scène jouée, les joueurs avancent sur la carte et une nouvelle scène à lieu. Ainsi de suite jusqu’arriver à la ville où on change la carte par une nouvelle et le jeu reprend alors sur le même fonctionnement. Viendra ensuite la carte du Château et enfin le combat contre la Comtesse.
Pour information, après quatre heures de jeu, mes joueurs sont arrivés jusqu’à la ville et on a décidé de clôturer l’avancée de la brigade sur cette obscure visite des égouts.
Conclusion de cette première partie
Macadabre a tenu ses promesses du début jusqu’à la fin de cette partie. Le système est simple à souhait, la narration a plu à mes joueurs et j’ai pris un malin plaisir à jouer le jeu prévu. J’ai d’ailleurs une seconde partie en gestation avec la même équipe pour qu’ils tentent de percer les mystères de Sainte Voile.
Au niveau des règles d’ambiance, le contrôle du moment de grignotages et les pauses toilettes a permis de garder le jeu fluide et de ne pas être interrompu. L’aspect « rester debout » n’a pas apporté de plus-value selon mes joueurs et j’ai l’ai abrogé après une heure de jeu.
Au niveau des règles du jeu, j’ai pris le pli de moins en moins m’y référer et de finalement pousser le côté narratif en limitant l’impact des résultats de dés pour privilégier l’aspect mortel et horrifique de Macadabre. Je n’ai pas senti de frustration ce qui me conforte dans l’aspect histoire à vivre plutôt que victoire à gagner.
Niveau ambiance, un de mes joueurs m’a clairement fait comprendre qu’il faudrait une pause de jeu entre les deux cartes pour pouvoir respirer et se détendre. Cet aspect du jeu doit vraiment être maîtrisé et surveillé car il est pesant (et c’est un plus) et cela peut décrocher un joueur du jeu lui-même.
Voilà donc ma première approche de Macadabre qui va donner suite à une autre dont je vous parlerais sûrement .
Ps: J’ai demandé à mes joueurs de faite un joli compte rendu que je vous transmettrais dès qu’ils l’auront fait !