Review (VF) : Dark Souls

Si vous lisez ceci c’est peut être parce que vous aimez mourir. Si vous venez juste tâter le terrain de la hype, c’est très bien aussi !  Chez le Quarantenaire entre deux jdr on fait aussi des jeux vidéos figurez-vous, du coup par les temps qui courent qui n’a pas entendu des jeux “From Software”? Elden Ring a pris le monde d’assaut en 2022 mais c’est de Dark Souls que l’on va parler ici. 

Fiche technique

Éditeur : Kuro Pop
Pagination : 300 pages

Résumé : 

La lutte sans merci des “Morteflammes” reprend maintenant sur une table !
Retrouvez toute la tension et les obstacles pesants qui font la saveur de la série Dark Souls et la joie de ses joueurs dans un jeu de rôle sur table. Devenez une « Morteflamme » et plongez-vous dans un combat sans fin pour survivre ! Munissez-vous d’un crayon, de dés, créez votre personnage et partez avec vos amis pour une aventure dans un univers rempli de dangers ! 

En préambule il faut que je vous raconte : le jeu est édité par Kurokawa, les spécialistes des mangas. Ils ont un sous-label : “Kuro Pop” qui leur laisse les coudées franches pour sortir des trucs inhabituels. Ce jdr est totalement inédit dans nos contrées, il s’agit d’un jdr d’origine Japonaise (car oui y a un jdr Dark Souls américain lui, sorti chez “Steamforged”, ils ne font quasi que des adaptations de licences) et cela soulève un truc auquel je n’avais pas pensé à la base : “font–t-il du jdr comme nous au Japon ?” Mon expérience des jdr japonais s’arrête à Ryuutama (en FR chez Lapin Marteau) et Dark Souls, si le premier était plutôt consensuel dans son approche et tout choupi, l’adaptation de Dark Souls l’est beaucoup moins… Choupi… Et consensuel… On a ici un tiercé normalement gagnant :


1) Le jdr a le vent en poupe actuellement.

2) Une licence assez forte au nom connu.

3) Le jeu a un réseau de distribution étendu grâce à son éditeur et touche un plus large public.

 

Et bien malgré toutes ces raisons Dark Souls se révèle un jeu qu’on peut qualifier d’expérimental et de pas super simple pour débuter si on a été curieux. 


Les principales difficultés arrivent par ses concepts adaptés directement du jeu vidéo éponyme, par ses mécaniques uniques et déroutantes, ses nombreux tableaux indigestes.

Le dernier opus en date.

Le tour du propriétaire.

On a devant nous une belle brique qui d’apparence extérieure est cossue : couverture rigide façon cuir, plaisante au toucher, au dos la petite phrase que tout le monde attendait “vous êtes mort”. Le contrat est rempli. 

Voyons à l’intérieur ! Bon, passé les 4 pages aux couleurs ternes d’intro à l’univers, on a affaire à un jeu totalement en noir et blanc… On va pas se mentir déjà qu’en 2022 c’est dur une telle austérité, en plus la mise en page n’est pas flamboyante et la direction artistique utilise des illus et screenshots directement tirés du jeu vidéo… qui, on ne va pas se le cacher, commence à vieillir visuellement (2017). 

Une belle brique de 304 pages qui vous sera facturée 49,90€, on est dans la moyenne pour le coup sauf que vous remarquerez vite un truc avec la mise en page qui vous hantera une fois que je vous l’aurai révélé : le jeu en VO est en format “manga” et, sans doute afin de contenter le public occidental, ils ont mis le tout en police plus grosse,ils ont très, très aéré les pages et fait un format classique A4. 

Autre fait notable, Il y a énormément de tableaux, partout, pour un oui ou pour un non, faut aimer le genre. Comme pour le jdr Witcher, certains diront que c’est un look “old school”, je vous laisserai seuls juges de si c’est votre truc ou pas.

Bon ok ok, l’habit ne fait pas le moine, même si ce moine là a un gros trou dans sa robe de jute, au niveau des fesses… Voyons le contenu. Après tout c’est le but d’une adaptation, prendre la substantifique moëlle d’une oeuvre et d’en faire un jeu de rôle. 

A nouveau les premières pages montrent (et je vais le dire plusieurs fois, j’ignore si c’est un ajout de la VF) qu’ils veulent s’adresser à un large public : fan du jeu vidéo, fan de jeu de rôle curieux. 

Le jeu a cela pour lui : il est didactique. Il vous prend par la main et vous expliquera les bases pas à pas. Malgré cela, on sent un truc directement : il y a des notions un peu “à côté” ou légèrement maladroites sur les termes utilisés en général en jdr et là je me suis dit : un éditeur dont c’est le premier jdr et un traducteur qui a l’air d’être spécialisé dans les mangas, mais du coup ni l’un ni l’autre n’a forcément l’expérience de la traduction de jdr. Un exemple frappant : ils appellent les scénarios des “campagnes”, alors que dans l’usage habituel une campagne sera un très gros scénario ou une suite de scénarios. il y a une multitude de petits éléments du genre qui trahissent sans doute le manque d’expérience dans le domaine rôlistique. C’est nullement pénalisant juste un peu étrange à la lecture. En plus arrivent très vite les “tableaux” indigestes avec des termes mathématiques. Du coup il est didactique, certes, mais indigeste au possible même après plusieurs lectures des passages compliqués.

le livre est découpé en 5 gros chapitres : 

1- la création ds PJ

2- les règles de base

3- le sanctuaire de Lige-Feu

4- les campagnes

5- les ennemis

Mais dans la pratique ça donne trois gros blocs : création des persos+règles, les scénarios, le bestiaire.

exemple d'austérité et de DA.

Héééé pssssst, tu veux des âmes ?


Oué vous avez remarqué y a pas de chapître “l’univers détaillé de Lothric”. Comme dans le jeu vidéo, beaucoup vous sera révélé par le système, la narration et les mécaniques spécifiques. Après en vrai, l’univers ne le nécessite pas vraiment de par son côté cryptique, vous jouerez un amnésique après tout : un cadavre animé par sa volonté de continuer la lutte et qu’on nomme “Morteflamme”. Votre personnage se réveillera avec son matos, il ignore pourquoi il le possède mais il sait s’en servir. Voilà, c’est tout, le livre nous l’annonce direct : on ne sait pas pourquoi on se bat contre les carcasses (les méchants). 

Chaque ennemi tué vous rapportera des âmes, ce sont à la fois la monnaie et l’expérience de cet univers. Vous devrez, comme dans le jeu vidéo, vous rendre à une “Sanctuaire de Lige-Feu” auprès de la Gardienne pour dépenser des âmes afin de gagner un (ou plusieurs) niveau(x). Ces mêmes âmes auprès des marchands permettront de vous acheter, armes, armures, boucliers, objets.

Tu vas caner lonely.

Une des mécaniques les plus attendues était la fameuse “Mort” si prégnante et si renommée dans les jeux vidéos. Et bien ils ont gardé ça sobre et efficace : votre Morteflamme a 3 souvenirs sur sa vie d’avant (vous les inventez ou vous utilisez les tableaux d’idées dans le livre), il s’y accroche et à chaque mort il en perd un. Les mathématiciens l’auront compris vous avez donc “4 vies” avant la mort permanente. A chaque décès vous vous retrouverez au sanctuaire. Encore une fois, on colle au jeu vidéo.

On arrive au côté expérimental le plus compliqué et ce qui éloignera sans doute les débutants, voire les habitués aussi : Dark Souls est un jeu principalement solo, et dans le jdr comme dans le jeu vidéo il est possible de faire venir des amis dans votre monde afin de vous aider à triompher. Mécanique unique : les invités ne peuvent pas parler, ils ne peuvent s’exprimer que par gestes et expressions: des émotes, comme dans le jeu vidéo. Il y a même une double page avec les émotes les plus connues pour vous inspirer ou, si vous êtes timide, la pointer du doigt afin de vous exprimer si vous n’avez pas envie de lever les bras en signe de victoire ou de sangloter avec votre main collée à votre visage. J’en rigole mais avouez, c’est particulier, perso je n’accroche pas du tout, on réduit à peau de chagrin l’aspect d’interprétation et interaction pour coller au mieux au jeu vidéo.

A partir de là vous l’avez déjà compris, le jdr à voulu bien trop respecter le matériau de base en conservant des mécaniques qui sont au mieux expérimentales voire hasardeuses ou voire même inadaptées à la pratique du jdr, selon moi. Ça reste une expérience à tenter sans doute, mais je vous vois mal partir sur une campagne (dans le sens rôlistique commun du terme) long cours. 

L’histoire est écrite par ceux qui ont échappé à la mort.

La structure même des scénarios proposés respecte au mieux le jeu vidéo : vous avancez par étapes via des cartes (oui comme des cartes à jouer) qui se dévoilent une à une. Chaque carte est un lieu et une épreuve qui vous sera révélée et décrite par le MJ. Ici y a une idée pas mauvaise qui rappelle des jeux comme Macadabre, l’avancée par étape et donc par scène, peut donner un sentiment un rythme intéressant et d’une narration cadrée par épreuves. Par contre ça limite la liberté de l’univers dépeint par le MJ et en cela ça peut aider les débutants, se focaliser sur une scène huis-clos sans se soucier de l’univers autour, ça peut être libérateur niveau préparation. 

 

gros feeling de manuel de maths

Si j’avais su que pour se battre il fallait être mathématicien.

On en arrive au nerf de la guerre : les combats. C’est également là que ça se complique largement. En cadrant autant les mécaniques émulant le feeling du jeu vidéo ils ont rendu le tout  graduellement indigeste.

Vos personnages auront par exemple accès aux fameuses fioles d’estus et de d’estus cendreux, respectivement les potions qui rendent de la vie (PV) et des points de concentration (PC) donc en gros la “mana”. Vous en aurez 4 au début de l’aventure, cela sera amené à augmenter selon l’avancée dans les scénarios et il vous faudra répartir ces 4 fioles selon vos besoins entre PV et PC.

Une mécanique amusante qui fait très jeu vidéo et pas tant jdr: vous devrez durant les combats utiliser une fiche de bataille. Sur cette fiche de bataille vos personnages auront accès à un nombre défini de zones de sécurité, dans lesquelles ils pourront consommer fioles de soin ou objets sans prendre de risque. Cette zone disparaîtra ensuite au round suivant. Limitant peu à peu ces replis défensifs. Ici encore c’est une mécanique qui peut aider les novices à souffler.

Ensuite le système d’initiative est inutilement compliqué : chaque initiative “double” (lisez, si 2 participants ou plus au combat ont tiré le même valeur d’init) vous avez un “retard d’action” et c’est l’initiative suivante qui pourra jouer. c’est très bizarre vous avouerez. Heureusement le joueur ayant déclenché cette “double initiative” gagne un point de chance… Ce qui du coup est amené à arriver assez souvent.

Chaque joueur aura un groupement de 5 dés de stamina (maximum) à répartir et à dépenser avec ses manœuvres. si il vous reste des dés à la fin du tour ils seront perdus, pensez-y si vous économisez des dés pour faire une “réaction” par exemple votre défense. Ici encore des tableaux avec des notions mathématiques qui perdront sans doute beaucoup de gens.

En bref

Ce “jdr” ne propose aucune concession de mécaniques vis à vis du jeu vidéo, il colle au plus proche à l’expérience virtuelle, c’est donc en ce sens plus une transposition qu’une adaptation.  Il y a des bonnes idées, mais aussi des concepts maladroits voir alambiqués. Le jeu n’est ni beau, ni agréable à lire avec son apparence de “brique” aérée mais mal mise en page, l’ensemble est austère avec ses nombreux tableaux compliqués. J’aimerais mettre la main sur une version VO pour savoir si c’est le jeu original qui est compliqué ou bien si la VF a empiré les choses. 

 

A qui recommander ce livre ? Aux ultra-fans de la licence qui ont de solides envies de tests. Ça restera donc un délire à tester pour l’amour de la licence et des expérimentations de jeu et non du rôle.

 

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